L'incontinence urinaire d'effort (IUE) de la femme peut être lié à une défaut de soutien de l'urètre (hypermibilité vésico-urétrale) et/ou une insuffisance sphinctérienne urétrale (ISU). Le choix du traitement doit prendre en compte le mécanisme à l’origine de l’incontinence urinaire d’effort. Un soutènement urétral par bandelette (TVT, TVTO, mini-bandelette) est l’intervention de référence lorsque l'hyper mobilité vésico-urétrale est le mécanisme prépondérant. Les résultats de cette chirurgie sont excellents puisque plus de 80% des patientes sont guéries après cette chirurgie.
Si l'insuffisance sphinctérienne urétrale (ISU) est à l’origine de l’IUE, l'emploi d'autres techniques parmi lesquelles le sphincter artificiel ou les agents injectables doit être envisagé, bien que la conduite à tenir soit à définir au cas par cas. Les échecs des bandelettes sous urétrales sont plus fréquents en cas d'IUE liée à une ISU (caractérisée par une pression de cloture urétrale basse et/ou d’un urètre fixé) [1-3]. Les recommandations des sociétés savantes et organismes officiels pour la prise en charge d’une ISU diffèrent quelque peu :
- Selon un rapport de l’ANAES 2003 (« Prise en charge de l’incontinence urinaire de la femme en médecine générale»), les traitements de référence de l’IUE par ISU chez la femme sont :
• « soit une injection endo ou periurétrale de diverses substances (téflon, graisse, collagène) sous contrôle endoscopique ou de petits ballons gonflables en silicone, efficaces en cas d’incontinence urinaire minime ;
• soit l’implantation d’un sphincter artificiel, manchette gonflable en silicone qui comprime l’urètre pendant le remplissage vésical et le libère pendant la miction. »
- Les recommandations de l’EAU (European Association of Urology) [4] et de l’ICS [5] en cas d’ISU de la femme sont les injections de substances de comblement (grade B), la mise en place d’une bandelette rétropubienne (grade A), et la mise en place d’un sphincter artificiel (grade B).
- Dans un rapport de 2007 (Quels implants de renfort pour traiter l’incontinence urinaire d’effort féminine ?), l’HAS stipule que « L’incontinence par urgenturie isolée ou insuffisance sphinctérienne majeure ne constitue pas une indication à la pose d’implant de renfort ».
Description des principaux traitements de l’ISU et résultats
Le principe général des traitements chirurgicaux de l’ISU est d’augmenter la pression intra-urétrale et la résistance à l’écoulement de l’urine dans l’urètre. Ils consistent pour la plupart à implanter un dispositif médical autour de l’urètre visant à le comprimer. Il existe donc un risque de lésion urétrale à long terme associé à chacune de ces techniques. A ceci s’ajoute le risque d’infection locale inhérent à toute pose de matériel étranger dans la région périnéale. Il n’existe actuellement aucun traitement de l’ISU visant à réparer les lésions neuromusculaires complexes à l’origine de l’incontinence urinaire.
Le sphincter urinaire artificiel AMS800
La mise en place d’un sphincter urinaire artificiel AMS 800 reste pour certains considérée comme le traitement de référence en cas d’ISU sévère chez la femme après échec de la rééducation pelvi-périnéale [6-9]. Ce dispositif médical consiste en l’insertion d’une manchette circulaire occlusive autour de l’urètre. Celle ci est connectée à une pompe placée dans une grande lèvre et à un réservoir placé dans la cavité abdominale. Lorsque la patiente ressent un besoin d’uriner, elle appuie sur la pompe qui va transférer le liquide remplissant la manchette compressive dans le réservoir, permettant ainsi à la patiente d’uriner. Au bout de quelques minutes, la pression régnant dans le réservoir renvoie spontanément le liquide dans la manchette et obstrue à nouveau l’urètre. Le taux de guérison avec ce dispositif médical est supérieur à 80% [9]. Cependant, il s’agit d’une intervention délicate qui peut nécessiter des reprises chirurgicales (21%) pour dysfonctionnement et se complique parfois d’infection locale ou d’érosion urétrale (6%) nécessitant alors son ablation [6, 7]. Ces deux complications sont souvent considérées comme sévères et compromettent tout autre traitement chirurgical en raison de la fragilisation de l’urètre qu’elles engendrent. Enfin, ce dispositif médical impose une bonne participation des patientes et un urètre relativement sain pour pouvoir être disséqué sans faire de brèche. Le sphincter urinaire artificiel ne doit pas être mis au delà de 80 ans et en cas de mauvaise coopération/compréhension du dispositif. La durée de vie moyenne d’un sphincter urinaire artificiel chez la femme est de 14 ans [10].
Les ballons ajustables (ACT)
Des traitements moins invasifs ont été proposés en alternative au sphincter urinaire artificiel. Il s’agit des injections péri-urétrales de substance de comblement inertes [11] ou la mise en place de ballons ACT (Adjustable Continence Therapy) [12, 13] compressifs par voie percutanée autour de l’urètre (2 ballons sont placés à 3h et 9h). Au cours de cette intervention, un trocart creux est introduit parallèlement à l’urètre jusque dans la région sous cervicale de la vessie, sous contrôle radiologique. Une fois le trocart introduit, l’opérateur largue par le trocart les ballons qui sont connectés à une tubulure ; celle-ci est enfouie dans la peau des grandes lèvres. Cette tubulure est accessible à une ponction percutanée qui permet ultérieurement de gonfler (ou dégonfler) le ballonnet jusqu’à ce que la pression s’exerçant sur l’urètre supprime les fuites tout en autorisant les mictions.
Les résultats des principales études ayant testé les ballons ACT dans l’ISU féminines montrent un taux de guérison de l’ordre de à 60% si le critère considéré est l’absence totale de protection urinaire. Le taux de complications et d’explantation du matériel est relativement élevé en comparaison des autres techniques chirurgicales mais ces complications restent généralement bénignes et n’empêchent pas la réalisation d’autres traitements :
- Wachter et al. [14] ont rapporté une série de 41 patientes en échec d’une précédente intervention pour IUE et traitées par ballons ACT. Sur un suivi moyen de 25 mois, 44% des patientes étaient considérées comme complètement continentes et 15% décrivaient une amélioration significative. Par ailleurs, 39% des patientes ont présenté une complication du traitement (migration des ballons, obstruction transitoire, infection).
- Chartier-Kastler et al. [15] ont présenté les résultats d’une étude multicentrique Française portant sur 68 patientes avec un suivi allant jusqu’à deux ans. Parmi les 39 patientes encore présentes pour l’évaluation à 2 ans, 21% (N=6/39) étaient complètement sèches, et 66% (N=19) présentaient encore quelques fuites mais se considéraient comme “nettement mieux qu'avant”, et 14% (N=4) n'avaient eu aucune amélioration. Des 68 patientes initialement implantées, 26 ont du être explantées. Dix huit l'ont été à cause d'une érosion (N=9), d'un déplacement du ballon (N=5), d'une infection (N=3) ou d'une rétention aiguë d'urine (N=1). Huit patientes ont également été explantées à leur demande compte tenu de la persistance d'une incontinence urinaire majeure.
- Vayleux et al. [13] ont rapporté les résultats d’une autre étude française sur un suivi moyen de 24 mois chez 67 patientes. Vingt neuf complications postopératoires ont été recensées chez 25 patientes (37,3 %): quatre rétentions aiguës d’urine en postopératoire immédiat, cinq déplacements de ballons, six infections prothétiques sans érosion décelée, dix érosions (urétrales ou vésicales) et quatre complications diverses (une dyspareunie, une douleur pelvienne persistante, une dysurie et une perforation de ballonnet). Chez 28 % des patientes (19), une explantation des ballonnets a été nécessaire. En fin de suivi, sur les 51 patientes porteuses de ballonnets 78,4 % (40) se disaient améliorées. Sur ces 40 patientes, 24 se déclaraient « très améliorées » avec un taux de satisfaction de plus de 80 % et 28 patientes portaient 0 ou 1 protection par jour maximum, pour une moyenne de 1,2 protections/jour par patiente.
Les injections péri-urétrales de substances inertes
Les injections péri-urétrales de substances inertes permettant de gonfler la paroi de l’urètre et ainsi d’augmenter la résistance à l’écoulement d’urine et la force de contraction du sphincter strié sont théoriquement séduisantes mais jusqu’à présent leur efficacité est restée limitée [11]. Le manque d’efficacité à long terme (en moyenne 30% à un an) est lié à la migration de la substance injectée ou à sa résorption. Ce traitement présente néanmoins l’intérêt d’être non invasif et peut être renouvelé. Récemment une nouvelle substance injectable (Bulkamid) a été testée avec un résultat encourageant puisque 66% des patients se considéraient comme guéries ou améliorées à un an. Cette étude a inclus des patientes présentant une IUE sans préciser le mécanisme (hypermobilité et/ou ISU) [16]. Ces résultats qui semblent persister à deux ans [17] nécessitent d’être confirmés par d’autres équipes.
Les bandelettes sous-urétrales synthétiques
La mise en place d’une bandelette sous-urétrale synthétique est en pratique souvent proposée dans le traitement de l’ISU [18]. Cette option représente le traitement de référence en cas d’incontinence urinaire d’effort liée à une hypermobilité vésico-urétrale simple chez la femme mais son efficacité en cas d’ISU et en particulier si l’urètre est fixé est nettement diminuée [1-3, 18-20] En effet, le principe d’une bandelette sous urétrale consiste à reconstituer le plancher de l’urètre ; elle ne modifie pas la tonicité basale du sphincter strié urétral. Les publications portant sur la mise en place de bandelette en cas d’ISU et/ou d’urètre fixés ont rapporté des résultats contradictoires. Ceci peut s’expliquer par le manque de consensus concernant les définitions de l’ISU, de l’hypermobilité vésico-urétrale et des critères de guérison [21]. Il est néanmoins admis que le taux d’échecs et de complications est plus élevé dans ce contexte notamment en raison de l’obligation de « serrer » un peu plus la bandelette sur l’urètre.
Rezapour et al. ont rapporté un taux de guérison de 74% à 4 ans de la bandelette TVT chez des patientes présentant une ISU sévère. Ces résultats n’ont pas été confirmés par d’autres études.
Selon Haliloglu et al. le taux de guérison et d’amélioration d’une bandelette sous urétrale par voie transobturatrice est de 96.4% à un an en cas d’IUE avec hypermobilité sans ISU associée. Le taux du succès est de 66,7% chez les patientes présentant une ISU et un urètre fixé. Dans cette étude, l’ISU seule (sans urètre fixé) n’était pas associée à un taux d’efficacité plus faible à condition d’un urètre non fixé.
Ces résultats diffèrent de ceux rapportés par Nager et al. [2] qui ont étudié l’influence de la fonction sphinctérienne sur le résultat des bandelettes sous urétrales par voie rétropubienne et transobturatrice chez 597 patientes. La fonction sphinctérienne a été évaluée par la mesure du LPP et la PCU. Il n’a pas été mis en évidence de valeur seuil satisfaisante (test ROC) pour prédire un échec de la chirurgie. Cependant, l’analyse par quartile a montré qu’un LPP inférieur à 86 cm H2O, et une PCU inférieure à 45 cm H2O conféraient un risque d’échec deux fois supérieur aux quartiles supérieurs.
Pour Summitt et al. [3] le taux de succès des bandelettes est de 93 % en cas d’hypermobilité vésico-urétrale (Qtip test>30°) et de 20% en l’absence d’hypermobilité.
En l’absence d’hypermobilité urétrale (urètre fixé) et de pression intraurétrale basse, Liapis et al. [19] ont rapporté un taux de succès de la bandelette sous urétrale TVT de 40%.
Il est important de mentionner que le taux réel de complications des bandelettes n’est pas connu étant donné le manque de standardisation de déclaration des effets indésirables [4]. Par ailleurs, la FDA a récemment exprimé les plus grandes réserves concernant la pose de plaques de renfort par voie vaginale y compris pour le traitement de l’incontinence urinaire.
A lire aussi
Bibliographie
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